La peste en Maurienne, par Pierre Dompnier
Article publié par Pierre
DOMPNIER dans les Travaux de La Société d'histoire et d'archéologie de
Maurienne, 1984. Document en ligne sur Gallica.
Il existe dans la
travée ouest du cloître de
Saint-Jean-de-Maurienne, une pierre funéraire, propriété de la Société
d'Histoire et d'Archéologie de Maurienne, qui porte l'inscription suivante
Ce Pierre Rol, membre du Conseil de Ville, assidu aux
assemblées, habitait aux Plans, près du chemin de Villargondran, et c'est là
qu'il avait fondé cet oratoire près duquel il fut inhumé. Sa pierre tombale est
le souvenir le plus tangible pour le grand public des épidémies de pestes qui
ravagèrent la Maurienne (comme toute l'Europe). Mais les archives sont
également assez riches sur ce sujet, notamment en ce qui concerne les XVI° et
XVIII° siècles : registres paroissiaux témoignant de l'effroyable mortalité,
délibérations municipales permettant de découvrir les mesures prises pour
lutter contre le fléau. De même, nombre de chapelles apportent leur témoignage.
Ceci nous a incité à nous poser quelques questions :
qu'étaient donc ces pestes ? comment se transmettaient-elles ? quelles mesures
matérielles ou spirituelles étaient prises pour les enrayer ? quel en fut le
bilan ?
QU'EST-CE QUE LA
PESTE ?
Mon ignorance en la matière m'a poussé à chercher cette
réponse tout simplement dans le larousse où l'on peut lire : «Maladie infectieuse
et contagieuse provoquée par le bacille de Yersin, transmise du rat à l'homme
par morsure ou par l'intermédiaire des puces, pratiquement disparue
d'occident»...«la peste bubonique est caractérisée par un ganglion infecté, ou
bubon, dans le territoire correspondant au point piqué ou mordu, et par un état
infectieux grave. La peste pulmonaire survient chez certains malades atteints
du bubon, et elle peut alors se transmettre directement d'homme à homme»...
En septembre 1588,
plusieurs morts suspectes s'étant produites à St-Sorlin d'Arves, les cadavres sont visités, afin de prendre, s'il
y a lieu, les mesures nécessaires. Et l'on constate en effet la présence de
charbons ou bubons soit sur les côtes, soit «sous le croupion ou en la cuisse».
C'est la seule description -bien brêve en fait- que j'ai pu trouver des
symptomes de la maladie en Maurienne. Les textes en disent davantage
heureusement quant aux mesures prises.
COMMENT SE
TRANSMETTAIT-ELLE ?
Nous l'avons dit plus haut, le principal véhicule de la peste
est le rat. En cas d'épidémie, les puces qu'il transporte passent sur l'homme
et lui transmettent la maladie. Mais ce système de transmission ne fut
découvert qu'à la fin du siècle dernier : le
Docteur Yersin n'isola le bacille de la peste qu'en 1894 ! Les hommes des
XVIe et XVIIe siècles savaient seulement que la maladie était contagieuse, d'où
leur souci d'isoler tous ceux qui avaient cotoyé un malade ; mais ils allèrent
parfois jusqu'à penser que le fléau pouvait avoir été provoqué volontairement
par des gens malintentionnés ! Camille Gabriel Forray écrivait, dans le 1er
volume des travaux de la Société d'Histoire et d'Archéologie de Maurienne en
1859 : «les croyances les plus absurdes s'accréditèrent au sein de nos villages
et de nos cités égarées. Le fanatisme religieux, surexcité par l'ignorance de
cette époque, attribua les effets d'un mal terrible, il est vrai, mais naturel,
aux sortilèges et aux maléfices des juifs. Ils furent accusés d'avoir corrompu
l'air et les eaux par leurs machinations diaboliques. Des milliers de ces
malheureux furent brûlés vifs, livrés à la torture, massacrés par le peuple sur
tous les points de l'Europe. A
Aiguebelle il y eu dix-huit victimes de cette erreur».
«Après avoir été séquestrées dans le fort, in castro
charboneriarum, sous la rigoureuse surveillance de Bernard de Murbel, qui était
châtelain d'Aiguebelle, castellani Aquabelle, elles furent soumises en 1348 à
la pénalité prévue contre les juifs, ensuite de la procédure instruite pendant
douze jours par Bernard Hugon et Reymond de Solier, que les tuteurs du
Comte-Vert chargèrent de cette mission. «Beneyton, Saul, son associé, Joyon,
servante de Beneyton, Lyonnet, Sanin, Vimoud, Bon, qui était encore enfant
(puer), Samuel, Mouxa, autre Beneyton, Coën, Héliot, Jacob et Bénion, son fils,
Samuel le petit, Abraham, Bénion, son associé, Samson et Samuel, son associé,
magister Benedictus, tels étaient les noms des individus formant une petite
tribu de juifs à Aiguebelle»...
Sans aller jusqu'à imputer aux juifs une transmission
volontaire du fléau, certains ont voulu voir tout de même en eux des coupables
par cupidité. C'est ce qu'écrivait le marquis Costa de Beauregard dans le T2,
2° série des mémoires de l'Académie de Savoie, qui leur reprochait d'entasser
«dans leurs demeures les dépouilles des cadavres qu'ils achetaient à vil prix
quand sévissait une épidémie» d'où «la funeste influence de ces dépôts infects
sur ceux qui en respiraient les miasmes».
Mais les juifs n'étaient pas les seuls suspectés d'être des
semeurs de peste, des «engresseurs de peste» comme on disait alors. Dans son
ouvrage sur «La Peste en Savoie» (1973)
Nicolas Greslou (qui cite d'ailleurs le lynchage des juifs par les
Chambériens en 1348 et la condamnationde 11 d'entre eux à être brûlés vifs dans
une grange) évoque le cas de plusieurs malheureux soupçonnés d'être des
engraisseurs et qui souvent avouaient sous la torture. Au XVI° siècle, ils
n'étaient plus brûlés comme les juifs du moyen-âge, mais «exécutés à mort» (?).
Nous n'avons pas trouvé de trace explicite de faits
semblables en Maurienne, pourtant,
dans les registres paroissiaux de St-André,
à la date de 1630, parmi les nombreux «décédez du mal contagieux» on trouve
le 12 octobre le nom d'une certaine Claudine, veuve d'Humbert, «lapidibus
percussa». Etait-elle suspectée de répandre volontairement la peste ? d'être
une de ces «engraisseuses» ? Il est difficile de l'affirmer, d'autant plus que
la peur de la contagion était telle que l'on était prêt à tout pour éloigner un
suspect. En 1588, un habitant de
St-Sorlin suspecté de contagion fut menacé d'être «arquebousé» s'il ne
s'éloignait du village, et ce n'était pas une menace en l'air.
En fait, l'homme que l'on menaçait ainsi, un certain Benoit
Bernard, arrivait d'un pays touché par la maladie, et il en avait rapporté des
«Besongnes», des vêtements. Vouloir l'isoler n'était donc pas si bête. Même si
leurs connaissances médicales étaient très limitées, s'ils ignoraient les
principes de la contagion, les gens de ce temps en connaissaient les effets, et
cela leur dictait les mesures à prendre.
LES MESURES
MATERIELLES
Dès que la présence de la maladie est constatée, des mesures
sont prises très vite afin d'isoler le secteur atteint, d'écarter les suspects,
d'ensevelir les morts, de soigner les malades, d'assainir les maisons
contaminées.
Commissaires,
procureurs
A
St-Jean-de-Maurienne, en 1565, comme le conseil général ne peut suffire à
toutes les tâches, il nomme un commissaire pour chaque rue, chargé de prendre
toutes les mesures nécessaires.
En septembre 1588, à
St-Sorlin-d'Arves on confie à deux «commis pour la santé» la surveillance
de tout ce qui concerne la maladie. Tâche importante, qui n'est pas confiée à
n'importe qui : l'un se nomme Jean Dedux, l'autre est noble Pierre Sallières
d'Arves. On désigne également des procureurs ou «serviteurs des affligés» qui
doivent gérer les affaires des malades, s'occuper de la nourriture, des soins,
contrôler les ensevelissements. Voici d'ailleurs précisées leurs tâches par
l'acte de leur nomination :
«A tous soyt notoyre
et manifeste que l'an 1588 et le 12ème du moys de septembre par devant moy
notayre ducal soussigné et présentz les tesmoings bas nommés personnellement
estably honneste Anthoine Didier scindic de la paroisse de St-Sorlin-d'Arves,
maistre André Chaix notaire, honneste Jehan Coche, Benoist et Sorlin Bernard,
Jacques Charpin, Claude Declugny-Charpin, Claude Chaix et Benoist Chastellard,
agissant pour et au nom de qui appartiendra. Lesquels suivantle cas fortuit
advenu en la diteparoisse de peste qui a pris pied en plusieurs chefs de
maysons que aussi depauvres misérables nayant de quoy se subvenir et pour iceux
affligés et soupçonnés dicte maladie tant riches que pauvres estantz réduitz en
cabanne dans leurs montaignes ne pouvant traffiquer à leurs urgents négoces,
aggréablementpour et aux noms de qui appartiendra pour les dicts affligés
subvenir en tout ce que sera requis et necessayre ainsy que chascung vray
chrestien doibt fere, ont eslu nommé et desputé procureur, negociateur et
serviteurs des dicts affligés scavoyr maistre Mathieux Milliex notaire ducal et
Thermoz Didier du dict lieu presents et la charge acceptants lesquels ont
promis ministrer les dicts affligés et soubçonnés ou quilz soyent riesre les
confins de la dicteparoisse tant de vivres, bois, linge et aultres choses a
eulx requises et necessayres et aussy conduire et fournir la nettoyeuse de ce
que sera requis et necessayre... et aussi conduire etfournir les sepvellisseurs
de tout ce que sera requis et necessayre...»
Pour leur travail, les procureurs recevront 1 florin par
jour, pour le notaire Milliex, 8 sous pour Didier.
Isoler le secteur
Les premières mesures prises consistaient à isoler le
secteur. Dès les premiers décès survenus à St Sorlin, un messager est envoyé
«en advertir Monseigneur le Révérendissime et M. le Corrier aulx fins mettre
gardes en la cité». Aussitôt le corrier donne l'ordre «de ne laysser aller
personne en cité». Des sentinelles sont placées au Col d'Arves pour empêcher
toute communication.
En 1545 la paroisse
de Beaune fut ainsi «bannie», c'est à dire isolée complètement. A St Jean, les syndics avaient placé 4
gardes au pont d'Hermillon (un pont en dos d'âne, que l'on pouvait fermer d'une
porte) ainsi qu'à celui de Villard-Clément. Interdiction était faite de laisser
entrer des gens ou des marchandises venant des lieux suspects : Genève,
Talloires, Faverges, Thônes, Moûtiers... tous lieux touchés par la contagion.
On peut douter de l'efficacité de leur contrôle : les gardes ne se
laissaient-ils pas acheter ? pouvaient-ils vraiment vérifier l'origine des gens
et des marchandises ? pourtant, St-Jean semble avoir été épargné par la peste
de 1545. Efficacité du système ? plutôt la chance.
Pour pouvoir circuler, il fallait être muni d'un billet ou
certificat de santé. Ainsi en 1599 à Foncouverte,
alors qu'au hameau de Riortier s'est produit un cas de peste, toute la commune
est séquestrée pendant un mois, puis le sénateur d'Humbert autorise l'entrée en
ville aux habitants munis d'une «billette». Etant donné les moyens de contrôle
de la contagion, on peut être sceptique quant à l'efficacité des mesures.
Parfois même, on ne se contentait pas d'établir des gardes.
A Valloire, d'après la tradition, un
cas de peste se serait déclaré en 1637 à Bonne-Nuit. Aussitôt, on construisit
une muraille pour isoler le hameau, muraille que l'on nomma «barricade des
pestiférés ». Sur ce mur on disposait quelques provisions (presque tous les
habitants de Bonne-Nuit auraient été emportés par la peste).
Les habitants n'auraient pas respecté spontanément l'isolement
: il fallait vaquer à ses affaires ! D'où la nécessité des gardes. En 1599 les syndics de Montrond
adressent à l'avocat général la requête de lever la garde au pont de Gevoudaz
car «la dicte paroisse soit hors de soupçon de contagion hors six ou sept personnes
que sont en sequestre dans la cure du dict lieu pour le décès de messire Jean
Charvin curé du dict lieu, décédé en la présente contagion ainsi qu'on la
soupçonné. Et néantmoings les gardes établies au pont de Gevoudaz font
difficulté les laisser venir pour les affaires urgens qu'ils ont en la présente
cité...»
Les cabanes
En ce qui concerne les malades -et toute personne qui aurait
eu des contacts avec eux- ils étaient isolés dans des cabanes, parfois de force
comme nous l'avons dit à propos de Benoit Bernard de St-Solin, menacé en 1588
d'être «arquebousé» s'il ne s'éloignait du village.
Ces cabanes étaient des constructions légères de planches,
couvértes de chaume. Leur mobilier se réduisait pratiquement à une paillasse.
Elles n'étaient destinées qu'à abriter les suspects pendant leur quarantaine
et, l'épidémie terminée, on les brûlait.
Leur emplacement a parfois laissé trace dans la tradition. A Montricher-Albanne un lieu-dit
Plan-Lazaret rappelle leur site. A
St-Martin-la-Porte, les pestiférés étaient isolés au lieu-dit «Sous la
Roche». A Valloire la tradition
raconte qu'ils devaient séjourner dans des grottes au-dessus du hameau de
Villard et qu'on leur portait à petite distance des vivres qu'ils venaient
prendre quand ceux qui les avaient apportés s'étaient retirés.
A
St-Jean-de-Maurienne, les cabanes étaient généralement établies aux
Clapeys. Durant la peste de 1564-1565, la maladie se déclara en septembre 1564.
Aussitôt on construisit des cabanes dans la propriété d'un certain Jean Borrel.
En décembre, l'épidémie semblait terminée, mais elle repartit de plus belle en
avril 1565 et l'on prit des mesures sévères : interdiction de circuler dans les
rues la nuit, tous les suspects transportés aux Clapeys, leurs meubles brûlés
hors de la ville, les portes de leurs maisons scellées, chiens et chats seront
tués ou tenus enfermés. On dit souvent que chacun était égal devant la maladie
: de fait, elle emportait indifféremment riches et pauvres. Pourtant ceux qui
possédaient une maison un peu isolée (et peut-être quelques moyens financiers)
pouvaient échapper à la dangereuse promiscuité des cabanes. Ce fut le cas de
noble Jean Rambaud qui, le vendredi 13 juillet 1565 faisait son testament non
pas aux Clapeys, mais près de la chapelle Saint Roch, au sortir de la ville du
côté d'Arvan, à gauche de la route. (chapelle fondée peut-être lors de la peste
de 1545 ou 1554, et unie ensuite au collège par Monseigneur de Lambert). En
1599, le 19 novembre, il y avait aux Clapeys 30 cabanes : 11 occupées par 23
malades, seize par 34 personnes soupçonnées de contagion et 3 par des
hospitaliers et buandières.
A Fontcouverte,
lors de la peste de 1588 les cabanes furent établies aux Rafforts (ou Rafour).
D'après les comptes de la commune, la nourriture et l'ensevelissement des
pestiférés coûta 272 florins et 10 sols entre le 7 octobre et le 13 décembre.
Lors de la peste de 1630, le premier décès fut celui du fils du notaire Claraz-Bonnel
: le défunt est enterré derrière la maison de son père qui, lui, est enfermé
dans une cabane à Pierre-Fiche avec sa domestique. Les autres membres de la
famille sont séquestrés dans la maison. Sont ensuite séquestrées toutes les
personnes qui ont eu des contacts avec le notaire, dont les deux syndics : il
faut donc en élire de nouveaux. On nomme des commissaires de santé. L'un d'eux,
Baudry, considère que Claraz-Bonnel a fait construire ses cabanes trop près de
la fontaine du village (à Pierre-Fiche) et il ordonne de les transporter au
Rafour «en lequel lieu est coutume faire les cabanes en ce facheux temps».
Il fallait peu de choses pour être contraint à l'isolement :
avoir approché un pestiféré ou fréquenté un lieu touché par la contagion. Ainsi
en 1630 Jacques Chaudet, qui avait été désigné comme commis pour la santé dans la paroisse de Fontcouverte, voulu
aller voir une maison qu'il possédait au hameau des Rossières. Or ce hameau
était atteint par l'épidémie : il fut condamné à rester enfermé dans sa maison.
Les soins,
l'ensevelissement, le nettoyage
Une fois l'isolement réalisé, pratiquait-on des soins ?
Ceux-ci se résumaient très simplement à nettoyer les linges infectés, les
maisons, et à percer les bubons. Ce dernier point devait être le fait de
chirurgiens ou de barbiers, mais parfois la même personne se chargeait de tout
: il semble que l'essentiel n'était pas le savoir, mais d'accepter d'approcher
les pestiférés.
En juin 1565 deux «cureurs et nettoyeurs de maisons» sont
chargés en outre de «percer les playes de ceulx qui seront atteings et détenus
de la dite contagion, et mettre en sépulture les morants d'icelle...»
Qui étaient ces «maistres cureurs» et autres
«sepvellisseurs» ? Ceux de St-Jean en 1565 venaient de Bardonnèche et d'Oulx,
mais la plupart du temps ils étaient mauriennais. On retrouve plusieurs fois
les mêmes noms : il y avait donc une certaine spécialisation. En 1587, le 25
octobre, la commune de Fontcouverte
fait appel à Jean-Pierre Constantin, d'Albiez-le-Vieux, pour se charger pendant
un mois d'ensevelir les morts.
En 1597, un certain Verdon est «médecin des cabanes». En août
1598 la commune fait venir des cabanes de St-Jean, un ensevelisseur aux
Pierres-Blanches. En 1599 c'est des Cuines que l'on fait venir des nettoyeuses
de maisons.
A St-Sorlin-d'Arves,
le 4 septembre 1588, c'est un certain Giroud Decluny qui est engagé pour
ensevelir les morts ; le 9 septembre un accord est passé avec Jeanne Falcoz,
femme de François Rol de St-Jean pour qu'elle se charge de «nettoyer, purger et
laver duement cinq maisons infectées de maladie contagieuse, avec l'aide de
Marmite Decluny, sa coadjutrice et chambrière... » Cette dernière fut-elle
victime de la maladie ? Ou ne suffit-elle pas à la tâche ? Le 23 septembre
Brise Didier est embauchée pour aider à nettoyer les maisons.
Quant à Giroud Decluny, nous le retrouvons embauché en 1599
(24 septembre) à St-Jean-d'Arves,
pour ensevelir les pestiférés. Il s'engage d'ailleurs à ensevelir aussi ceux de
sa paroisse (St- Sorlin) si la contagion l'atteignait.
A Albiez-le-Vieux, le 23 juin 1565, c'est Bernard Verney qui est
engagé pour ensevelir les pestiférés et nettoyer les maisons pour une durée de
40 jours. Ne peut-il terminer son engagement à cause de la maladie ? Une
vingtaine de jours plus tard un nommé Antoine Francoz passa le même contrat. Ce
dernier ne semble pas avoir eu plus de chance : le 28 juillet (une quinzaine de
jours après) les syndics engagent Catherin Bonnet, pour ensevelir les corps,
brûler les cabanes des décédés, leurs meubles...
Ces tâches étaient donc très dangereuses. Qu'est-ce qui
poussait ces gens à les accepter ? Bernard Verney, d'Albiez-le-Vieux déclare
que c'est surtout «pour l'amour de Dieu et du prochain». Son salaire est fixé à
20 florins à l'expiration des 40 jours, plus sa nourriture et son
ensevelissement aux frais de la commune s'il meurt avant. Ce salaire semble peu
élevé. Son successeur Antoine Francoz se voit proposer le même, plus une
pichelette de vin par jour. Le troisième, Catherin Bonnet est plus gourmand
(mais le sort de ses prédécesseurs a de quoi donner à réfléchir). Il reçoit une
couverture, un linceul et de la paille pour sa couche, sa vie durant deux
sestiers de seigle à la St André, à la fin de l'épidémie un habillement complet
(habit en drap du pays, chausses, socques, chapeau, benette).
Cela allait déjà plus loin que l'amour du prochain, même si
celui-ci n'était pas absent. Il était bien présent en tout cas à Lanslebourg en 1630, lorsqu'après le
décès du curé, Jacques Aiglet curé de Montvernier mais natif de Lanslebourg
s'offrit pour rejoindre sa paroisse d'origine et assister les malades. Il y fut
autorisé par Monseigneur Bobba, et, la peste finie, il demeura curé de
Lanslebourg.
Mais en général, c'était plutôt l'attrait d'un salaire élevé
qui poussait certains à accepter un tel risque. A St-Jean en 1565, les deux «cureurs» de Bardonnèche et d'Oulx sont
engagés pour la somme de 146 écus de 5 florins pièce, plus les vivres ainsi que
«mirre, encens, savons et autres choses requises et nécessaires...». On est
loin des 20 florins pour 40 jours de Bernard Verney d'Albiez-le-Vieux.
A Fontcouverte en
1587, l'ensevelisseur, Jean-Pierre Constantin d'Albiez-le-Vieux, perçoit 60
florins pour un mois, plus un florin par jour pour sa nourriture (idem durant
sa quarantaine) et un habillement neuf, chapel, robe, haut et bas de chausses,
souliers.
A St-Sorlin en 1598
Giroud Decluny reçoit 40 florins «et sa vie pendant qu'il sevelira». Jeanne
Falcoz pour nettoyer les maisons reçoit 300 florins, sa chambrière 20 ; Brise
Didier 60. A cela s'ajoute la nourriture pendant leur travail et leur
quarantaine : près d'un quintal de viande pour Jeanne Falcoz. En quoi
consistait le nettoyage ? Nous avons vu que certains contrats prévoient la
fourniture d'encens, de myrrhe, de savons... Les maisons étaient parfumées en y
faisant brûler myrrhe et encens, parfums, toutes portes et fenêtres closes. Les
meubles et linges étaient parfois brûlés (c'est le cas à St-Jean en 1565) ou
lavés. A St-Sorlin en 1588 on dépensa 37 florins 7 sous pour les «mestions et
drogues employées pour les nettoyures des maisons et pour laver les meubles».
Outre la myrrhe et l'encens on utilise le souffre, l'arsenic. Après quoi une
personne bien portante «essaye» la maison en y séjournant une dizaine de jours
(moyennant un salaire évidemment). Si rien ne se passe, la maison est déclarée
saine, et, si ses occupants ont terminé leur quarantaine en cabane, démontrant
qu'ils n'étaient pas contaminés (à moins qu'ils ne soient guéris, cela
arrivait) ils peuvent regagner leur domicile. Généralement on exigeait qu'ils y
effectuent encore une quarantaine (de 10, 20 ou 40 jours).
Ceux qui ont eu moins de chance et ont succombé à la
maladie, sont ensevelis à l'écart. Le 11 octobre 1630 le recteur de Bonne-Nouvelle,
Martin Duc est enterré derrière le sanctuaire «dans la partie du jardin qui
regarde Hermillon». Mais généralement les habitants de St-Jean étaient
ensevelis près des cabanes, aux Clapeys. A
Modane un lieu dit «Les Glaires» près du pont de Loutraz, avait accueilli
les nombreux morts (plus de 400) de la peste de 1630. Jusqu'au début de ce
siècle, on y effectuait une procession le 2 novembre. A St-André les sépultures se faisaient vers la chapelle St Etienne,
sur le petit plateau qui domine le village.
Les biens-portants
Les biens-portants cherchent évidemment à se préserver de
tout contact avec les régions infestées : nous avons vu la mise en place de
gardes aux principaux passages. Mais il faut tout de même se ravitailler, ce
que l'on fait avec un maximum de précautions. Le 13 septembre 1564, la récolte
de seigle ayant été insuffisante à Modane et le conseil craignant que les
habitants n'aillent acheter le blé en des lieux «pestiféreux», il charge
Jean-Michel Chinai, Jacques Meynet, Jacques Long, François Taburd, Mathieu
Pinet et Jean Valloire de s'occuper de l'achat et de la distribution de blé.
Mais cela ne suffit
pas. On se méfie de tout le monde. On évite tout contact. Nous avons cité tout
à l'heure la chapelle St Etienne, située au-dessus du village de St-André. Vers
1880 l'abbé Besson, curé de St-André, l'acheta alors qu'elle tombait en ruine,
et la fit réparer. A l'extérieur, du côté de l'abside, se trouvait un autel
formé d'une simple table de pierre ornée de trois croix. L'abbé Besson le fit
reconstruire, au milieu du mur de la chapelle, et fit peindre au-dessus
l'inscription : «Autel pendant la peste de MDCXXX». La tradition disait en
effet que, durant la peste, le curé disait la messe sur cet autel, pour la
population éparpillée sur les pentes dominant le plateau, afin d'éviter la
contagion.
Il est pourtant des circonstances où la rencontre des
malades est difficile à éviter : lorsqu'ils veulent rédiger et faire
enregistrer leur testament ! Or une épidémie de peste est précisément un moment
où beaucoup décident de faire leur testament, surtout ceux qui, soupçonnés
d'être atteints par la contagion, sont isolés en cabane et attendent une mort
presque certaine et imminente.
Mais comment le notaire pouvait-il accepter d'approcher un
pestiféré, au risque de contracter la maladie ou, en tout cas, d'être suspecté
et isolé à son tour ? En fait la rencontre ne se fait qu'à distance
respectable. Ainsi le 16 août 1630 le notaire Antoine Thomasset est appelé pour
rédiger le testament «d'honneste Aymé Exchampier» du hameau de la Verdette
(pour Vernette, à moins qu'il ne s'agisse d'un hameau disparu) ; il précise que
les témoins et lui-même se sont tenus «Denvyron douze toyses exloigné du dict
Aymé Exchampier testateur». Les mêmes précautions avaient été prises le 30
septembre 1565 par le notaire Jean Marquet. Celui-ci rédige le testament de
Guillelmine Rossat (née Ducrest) des Rossières. Celle-ci est «atteinte et
détenue de maladie contagieuse de peste aux cabanes avec les autres pestiférés
d'icelle cité» aussi Marquet précise-t-il qu'avec les témoins il s'est tenu sur
le pré de Françoise Brun «auprès dictes cabanes». De nombreux testaments sont
ainsi rédigés dans les champs ou sur les chemins. Mais il arrive aussi que l'on
manque de notaire et de témoin. A Beaune
en 1545, les habitants se trouvent privés de la possibilité de tester,
ainsi que des derniers sacrements par la mort de leur curé, que le chapitre ne
peut remplacer tout de suite. Or, en l'absence de notaire, le curé pouvait
recevoir les testaments. Le 2 mai, un clerc, Sébastien Assier, est autorisé par
le juge-mage à recevoir les testaments, à la condition qu'ils soient vérifiés
par lui plus tard. Pour ces testaments il ne trouve pas toujours le nombre de
témoins nécessaire. La chose s'était produite déjà à Fontcouverte en 1472 : le curé Pierre Thorain reçoit, à défaut de
notaire par ces temps d'épidémies, le testament de Pernette Cartier, veuve de
noble Gabriel Vallin, qui lègue une vache à une femme qui a soigné ses deux
filles mortes de la peste. Elle-même est atteinte de ce fléau. En 1478 le même
curé reçoit le testament d'une autre fille de Gabriel Vallin «à cause du mal
contagieux et de l'isolement».
Ce soucis bien compréhensible d'éviter tous les contacts se
retrouve d'ailleurs chez tous : il n'épargne pas les grands de ce monde
(auxquels les danses macabres rappellent leur égalité devant la mort avec le
plus humble). Durant l'été 1630 Louis
XIII et Richelieu sont en Maurienne (ils logent au palais épiscopal). Les
chroniqueurs se sont peu étendus sur les problèmes de la population victime de
la peste, mais ils nous apprennent que le 13 juillet le roi prit médecine, qu'il
en fut «extrèmement purgé» ce dont son médecin eut une «grande joie». Le 25
juillet le roi est à Argentine où il doit coucher dans les prés car «tout était
plein de peste». Richelieu, qui reste à St-Jean jusqu'au 17 août écrit : «je
fusse volontiers demeuré à St-Jean-de-Maurienne mais inutilement, la peste
étant partout».
LES MESURES
RELIGIEUSES
En notre siècle matérialiste, il était logique de
s'intéresser d'abord aux mesures les plus terre-à-terre. Mais pour les gens de
l'époque ces mesures ne pouvaient avoir d'efficacité sans l'intervention
divine. Aussi fondations de chapelles, de messes, processions et pèlerinages,
représentations de mystères étaient parmi les premières mesures prises.
Les chapelles
Nous citions tout à l'heure la pierre funéraire de Pierre
Rol comme le témoin le plus tangible pour nous de ces pestes. Mais les
chapelles le sont plus encore, même si, au premier abord, elles n'évoquent pas
directement le fléau. Les Saints auxquels elles sont dédiées le plus souvent
sont : Saint-Roch (1295-1327
Montpellier) qui se voua au soulagement des pestiférés, Saints Cosme et Damien, martyrs sous
Dioclétien (v. 295) patrons des chirurgiens. Mais on en trouve d'autres. A
Lanslevillard, la chapelle St Sébastien, l'un des joyaux de la Maurienne, a été
dédiée à son St Patron par Sébastien Turbil qui avait échappé à la peste. A
Sollières on fonda une chapelle St Sébastien à l'Adroit, une chapelle St Roch
et une chapelle St Pierre à l'envers. C'est lors de la peste de 1565 que fut
fondée à Jarrier la chapelle St Roch au lieu-dit «La Vardaz». En 1598 la
communauté de St-Avre faisait voeu d'élever une chapelle sous le vocable des
Saints Sébastien et Roch. A Villargondran, on peut lire dans une texte de 1609
: «au nom de Dieu soyt-il. Amen. A tous soyt notoyre et manifeste comme ainsi
soyt que en l'année 1598 la contagion régnant en la paroisse de Villargondran
les sindics et communaulté du dict lieu se seraient voués de bastir et ériger
une chapelle ou oratoyre près la croix de Rieubel en l'honneur de messeigneurs
saincts Roch et Sébastien affin qu'il pleut à Dieu par leur prière et
intercession d'appayser son ire et fere cesser le dict mal contagieux». A
Lanslebourg en 1630, c'est aux Saints Cosme et Damien que l'on se voue. Et
cette énumération ne prétend pas être exhaustive.
Les messes
Souvent aussi on fondait des messes. Cela fut l'occasion à
Jarrier d'une contestation assez mesquine. Lors de la peste de 1598-99, on fit,
entre autres voeux, celui de fonder une messe, tous les vendredis à la chapelle
St Roch et, pour cela, de constituer un revenu annuel de 50 florins. Mais la
peste terminée et le danger oublié, les habitants prétendirent que les messes
ne devaient durer que jusqu'à l'accomplissement des autres voeux, ce qui
n'était pas l'avis du clergé.
En 1622, Monseigneur Bobba ordonna une enquête : Révérend
Urbain Pernin, qui était vicaire en 1598 (la cure de Jarrier en effet,
appartenait au chapître qui désignait un vicaire) déclara que cette fondation
était perpétuelle et que les habitants avaient décidé d'alberger des communaux
à des particuliers pour constituer la rente de 50 florins destinée à payer les
messes. Nous ne connaissons pas la suite de l'enquête.
Processions et
pèlerinages
Le conseil général de St-Jean décida le 12 août 1565, que,
la peste étant pratiquement terminée, la procession à St Roch le 16 août (jour
de la fête du saint) se ferait avec une dévotion toute particulière.
Mais ce n'était là qu'une petite procession et le plus
souvent on faisait le voeu de se rendre à Notre Dame du Charmaix : ce fut le
cas de Jarrier en 1598-99, ainsi que de St-Jean. Dans son livre «Diva Virgo
Charmensis» Jacques Bertrand écrivait «lorsqu'une peste cruelle désolait les
villes et les villages de Maurienne et faisait tant de ravages qu'on pouvait
craindre qu'un pays jusqu'alors si peuplé ne fut réduit en vaste solitude,
quelle puissance l'a arraché des gorges de la Mort ? C'est sans aucun doute, le
patronage de la Vierge Marie».
C'est également à Notre Dame du Charmaix que les
Fontcouvertains décident, le 24 novembre 1630, d'effectuer une procession en
blanc, dès que possible. Les syndics y offriront deux flambeaux de cire blanche
d'une livre et demie chacun et on assistera à une messe chantée et à une messe
basse. A cela ils ajoutent d'autres voeux :
- de faire trois processions en blanc dans la paroisse, avec
jeûne et à chaque procession seront célébrées deux messes.
- une procession à Notre Dame de Bonne Nouvelle où sera célébrée
une messe chantée et où les syndics offriront 10 florins de Savoie pour la
réparation de la chapelle, puis une procession à la cathédrale pour vénérer les
reliques de St Jean-Baptiste et de là à l'église des Capucins ou les syndics
offriront un quarteron de beurre et un fromage.
- d'agrandir l'église de Fontcouverte, trop petite.
Les mystères
L'une des décisions les plus habituelles, pour s'attirer la
protection divine, était celle de représenter un mystère. On en possède de
multiples exemples, et certains textes sont parvenus jusqu'à nous.
La plus ancienne mention que j'ai trouvé en Maurienne du
voeu de représenter un mystère pour faire cesser la peste est de Beaune en 1545, ou les habitants font le
voeu de jouer le mystère de St Sébastien.
En 1565 le peintre Jacques Roche de Sollières peint les
décors pour la représentation du mystère
de St Sébastien à Albiez-le-Vieux. La même année les habitants de
St-Martin-la-Porte représentèrent la vie de leur Saint Patron «Cause d'ung veu
faict à l'occasion du mal de peste qui la menaçoit et linfectoit lan devant
1564 et dont fust myraculeusement délivrée par l'intercession dudict Benoit
Saint Martin». Le texte de ce mystère, que les archives paroissiales ont
conservé, a été déchiffré en 1898 par Florimond Truchet, qui, devant la qualité
de l'oeuvre se demandait si elle ne pouvait être attribuée à Nicolas Martin. Ce
mystère fut interprêté sur deux journées par 74 «acteurs» du pays qui
demandaient ainsi l'indulgence de l'auditoire :
Presquedujeu toute la trouppe
Est gent de travail et labeur
Et pour
aultant selle se couppe
Au parler etfaict quelque erreur
Vous ne debves pas la reprendre
Comme feroït un détracteur
Mais il vous fault et convientprendre
Pour le bon effect le bon coeur.
A St-Jean, selon
une délibération du conseil (archives municipales série BB) : «en l'année 1598,
la présente cité et circonvoisines étant atteintes de maladie contagieuse, les
habitants se seraient unanimement assemblés et auraient fait voeu solennel de
représenter le mystère de la vie, martyre et passion de Saint Sébastien». La
même année la communauté de Jarrier décidait
de représenter la vie et la passion de son Saint Patron, St Pierre. Ceci ne fut
fait que 6 ans plus tard, le 30 juin 1604. Ce délai montre bien que la mise en
place d'un mystère n'était pas une mince affaire. C'est peut-être lors de la
même épidémie qu'une semblable décision fut prise à St-Jean-d'Arves et
Albiez-le-Vieux, or à St- Jean-d'Arves ce n'est que le 24 juillet 1607 que fut
représenté devant Monseigneur Philibert Milliet la destruction de Jérusalem par
Vespasien et Titus et l'invention de la Saint-Croix. A Albiez-le- Vieux le même
évêque assista le 22 juillet 1609 à la représentation de l'histoire de
l'empereur Jovinien (ou Jovien ?).
A Sollières le 25
août 1630, la population fait le voeu de représenter l'histoire de son
Patron, St-Etienne.
BILAN ET ESPOIR
Les pestes se sont traduites par d'effroyables bilans
démographiques, même s'il faut se méfier parfois des chiffres annoncés par
certains. Ainsi on peut lire dans «La Maurienne» par les instituteurs que Aussois qui comptait 1600 habitants en
1630 fut presque anéanti par l'épidémie. Il ne serait resté que 27 survivants
qui préférèrent d'ailleurs émigrer. Quelques années plus tard des habitants
venus de Tarentaise auraient repeuplé le village. Le Chanoine Gros a parfaitement démontré l'invraisemblancede ces
chiffres : Aussois comptait tout au plus 754 habitants et le nombre de décès
dus à la peste fut de 49 (en un temps très bref il est vrai). Quant à la
prétendue immigration tarine, disons simplement que les noms portés par les
familles après cette peste sont déjà presque tous mentionnés dans les terriers
de 1512 et 1554. En fait le bilan est assez terrible pour n'avoir pas besoin
d'être exagéré. Monseigneur Billiet
avait dénombré pour 52 paroisses dont les registres sont conservés, 3 403 décès
pour une population d'environ 40 500, soit un taux de 83%°. Mais il est
peut-être au dessous du chiffre : il compte 309 décès à Lanslebourg pour 896
habitants, or il y a 316 actes de décès, et certains sont collectifs (ex : le 8
juillet celui de Pierre Burtin et de toute sa famille). Modane eut 466 décès
sur 962 habitants. Valloire eut 128 morts. Aiguebelle perdit près de la moitié
de ses 500 habitants.
Mais, dès l'épidémie terminée, on prend une revanche sur la
mort : à Modane 56 mariages sont
célébrés en 3 mois, à Valloire : 13 le même jour. La natalité repart de plus
belle. Le taux de mortalité est relativement bas durant les années qui suivent
une peste, comme si celle-ci avait effectué une sorte de sélection naturelle.
Les survivants manifestent leur foi en l'avenir en accomplissant leurs voeux,
ce qui nous vaut aujourd'hui quelques splendides chapelles, dont le passant ne
soupçonne pas toujours ce qu'elles ont représenté de misère et d'espoir.
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